Honneur aux anciens

Editorial du COM.LE du Képi blanc N° 759.

Comme cela a été annoncé, le ministère de la Défense conduit des réformes d'envergure qui doivent se traduire par des gains d'effectifs particulièrement significatifs au sein de l'armée de Terre. Et la Légion étrangère n'échappe pas à la règle. Dans ce contexte, nos unités seront concernées dès l'année 2014.

Parmi les mesures déjà connues, la restructuration du 1er Régiment étranger de cavalerie et son déménagement constituent deux nouvelles étapes dans son histoire. Mais ce n'est pas la première fois, depuis sa création en 1921. Comme tous les régiments, il a connu des évolutions, imposées par ses missions, équipements et garnisons. En Indochine, il compta jusqu'à dix-huit escadrons. Aujourd'hui, le régiment sait qu'il va devoir se réarticuler avant l'été en dissolvant un escadron. Ce sont quatre escadrons blindés et non cinq, qui déménageront.

Mais on ne quitte pas une garnison dans l'indifférence après 47 années. Arrivé d'Algérie en 1967, le régiment a été accueilli et adopté d'emblée par la ville d'Orange. Il s'est rapidement installé dans cette région particulièrement appréciée et la population a pris l'habitude de voir les légionnaires se promener en tenue dans les rues ! Les plus anciens se sont retirés sur place et constituent désormais une importante communauté parmi les Orangeois et dans tout le département. Ils forment l'ossature de l'amicale des anciens légionnaires du Vaucluse dont le dynamisme est connu de tous. Pour ces fi dèles parmi les fi dèles qui ont pour beaucoup vécu de nombreuses années dans ce régiment avant de le soutenir de l'extérieur, ce départ est chargé d'émotion. Je pense notamment au général Raymond Lorho, ancien chef de corps du 1er REC (1973-1975), porteur de la main du capitaine Danjou le 30 avril 2011, et dont le nom a déjà été donné à une rue de la ville d'Orange.

Et pourtant, la réaction de ces anciens mérite d'être soulignée par sa dignité, sa discrétion et son soutien, malgré la surprise. Ayant souhaité les rencontrer lorsque je suis venu au régiment après les annonces, je voudrais témoigner de leur exemplarité, de leur sens du bien commun, malgré un déchirement intérieur aussi profond que légitime. En effet, si le 1er REC doit déménager à l'été, laissant derrière lui des années de liens tissés, témoins d'un lien "Armée-Nation" en tous points remarquables, se pose la question de l'avenir du cimetière du Coudoulet, nécropole officielle où peuvent être enterrés les légionnaires d'active. Créé en 1984, plus de cent cadres et légionnaires y reposent aujourd'hui. Et il continuera à accueillir ceux d'entre nous qui tomberont, comme il le fait depuis 30 ans. Les anciens n'ont pas hésité une seconde, faisant immédiatement acte de volontariat pour assurer l'entretien de ce site plein de souvenirs et de fierté. Ils n'ont pas oublié les valeurs que nous partageons. "...Tu n'abandonnes jamais ni tes morts ni tes blessés..." nous rappelle l'article 7 du code d'honneur du légionnaire. Dans le plus pur esprit de fidélité, malgré ce départ de la garnison d'Orange, la Légion étrangère continuera à veiller sur ceux qui reposent dans ce cimetière.

Comme chaque année, je présiderai au début du mois de novembre la cérémonie d'hommage à nos morts au cimetière du Coudoulet et serai accompagné par des délégations du 1er REC et des régiments qui pourront s'y associer. Toujours aussi fidèles, les anciens seront également présents. Et cette cérémonie annuelle perdurera !

S'agissant du déménagement, c'est désormais une mission. Et nous pouvons compter sur le 1er Régiment étranger de cavalerie pour franchir cet obstacle avec détermination. Les légionnaires au caractère bâtisseur sauront relever ce défi avec talent. Ils surmonteront les difficultés afin que leur régiment tire le meilleur parti des infrastructures qu'ils trouveront dès l'été prochain sur le camp de Carpiagne.

Général Christophe de Saint Chamas,
commandant la Légion étrangère

Source : Képi Blanc magazine
Crédit : Légion étrangère

| Ref : 325 | Date : 30-10-2013 | 17787